La peur de l'échec : votre cerveau vous joue des tours !

D'où vient la peur de l'échec exactement ? Remerciez votre cerveau, cet organe fascinant qui vous joue des tours constamment.

Les études démontrent le point suivant : lorsqu'on pense à un échec, on a l'impression qu'il sera insurmontable. En revanche, après avoir vécu ce même échec, on arrive à le dompter sans problème.

Ce qui me fait dire que la peur de l'échec n'est qu'un subterfuge du cerveau pour nous protéger et nous éviter des situations qui pourraient perturber notre bien-être. Sachant qu'il n'en sera rien !

Bizarre non ?

Je vous propose donc d'explorer ce sujet, de faire un petit bilan et d'en tirer des conclusions pratiques.

La peur de l'échec

 


Le système immunitaire psychologique

J'ai rencontré ce terme dans l'excellent livre "Stumbling on Happiness" de Daniel Gilbert (voir aussi référence 1). Je n'en avais jamais entendu parler avant (que voulez-vous, je ne suis pas psychologue). Mais il explique énormément de choses.

Notre système immunitaire physiologique nous protège contre les agressions physiques extérieures (coupure, blessure, bactéries, virus, parasites, etc). Celui-là, on le connaît bien.

Notre système immunitaire psychologique, lui, nous protège contre les blessures émotionnelles. Et son job est de justifier une situation douloureuse (quitte à manipuler "légèrement" notre réalité) afin de passer une pommade réparatrice sur notre psyché.

Il protège et répare les bobos émotionnels ! Fascinant non ?

(note : pour une panoplie de toutes les méthodes qu'il utilise pour nous protéger, ce coquin, voir le livre de Gilbert).

 


La peur de prendre des risques

Notre cerveau est ainsi fait : il a horreur de la prise de risques. Il agit ainsi pour nous protéger, bien évidemment.

Au fil des millénaires, l'espèce humaine a survécu car elle a eu une capacité assez incroyable à s'adapter. Ceci s'est fait en évitant les risques inutiles.

Et on ne parle pas forcément du risque de perdre sa vie ici, par exemple en voulant absolument aller ramasser ces délicieuses myrtilles au bord du précipice.

On parle aussi de faux pas ou autres maladresses qui auraient pu nous faire exclure du "troupeau". La peur d'être rejeté par notre groupe est tout en haut de la liste pour l'animal de tribu que nous sommes. La peur de l'échec et donc ici une peur sociale.

Tout ceci part d'un bon sentiment d'un point de vue évolution de l'espèce, mais aujourd'hui, c'est aussi une cause d'immobilisme :

  • Peur de démissionner car le salaire qui tombe à la fin de chaque mois, c'est plutôt bien, le "projet du cœur" attendra ;
  • Peur de prendre la parole devant toutes ces personnes parce que je ne maîtrise pas mon sujet ;
  • Peur de dire les quatre vérités à tonton Jacques qui nous a gâché la vie pendant tant d'années ;
  • Etc.

Imaginons le pire des cas : et si, effectivement, en voulant changer notre vie, on se prenait le gros râteau qui fait bien mal aux dents ?

Va-t-on s'en remettre ?

 


Le pouvoir de rationaliser

Oui, on va s'en remettre, et plutôt bien.

De nombreuses études démontrent que lorsque nous subissons un gros revers de la vie - accident grave, perte d'un proche, etc - nous revenons, au bout d'un temps, au même "niveau de bonheur" qu'avant.

Comment est-ce possible ?

Merci système immunitaire psychologique. En général, les personnes ayant subis de tels épisodes vous diront qu'elles ont énormément appris de ces expériences. Ces épisodes sont donc formateurs et structurants.

Par exemple, évoluant beaucoup dans le monde de la santé, j'ai pu rencontrer de nombreuses personnes qui m'ont expliqué comment leur maladie avait été un appel au changement. Aujourd'hui, elles se sentent transformées et expriment de la gratitude envers cette expérience.

Il y a des exceptions bien évidemment, et ceci n'arrive pas immédiatement. Il faut du temps pour digérer l'expérience et en faire ressortir le bon côté.

Mais dans l'ensemble, nous pouvons très bien justifier et donc surmonter un épisode difficile ou un échec.

 


En rétrospective : regret de l'inaction

Les études montrent que quel que soit notre âge, sexe ou culture, nous regrettons l'inaction largement plus que l'action.

Par exemple, supposez que vous investissez en bourse. Imaginez que vous pouvez faire 2 types d'erreurs :

  1. Vous possédez des actions de la société A et ces derniers temps, vous pensiez basculer l'investissement sur les actions de la société B. Vous ne l'avez pas fait. Si vous l'aviez fait, vous auriez eu 1200 € en plus.
  2. Vous possédez aussi des actions de la société C. Ces derniers temps, vous avez décidé de basculer l'investissement sur les actions de la société D. Si vous ne l'aviez pas fait, vous auriez eu 1200 € en plus.

Quelle erreur vous donne le plus de regrets, l'erreur 1 ou 2 ?

Voici ce qui est fascinant : avant de faire l'erreur, si vous êtes comme 9 personnes sur 10 dans cette étude, vous répondrez 2. Car le changement fait peur lorsqu'on y pense avant de l'avoir entrepris. On pense donc préférer une erreur d'inaction.

En revanche, la réalité montre que c'est l'inverse qui se passe une fois que l'erreur est faite ! 9 personnes sur 10 regretteront largement plus l'erreur 1 que l'erreur 2 (voir livre de Gilbert pour les références).

Pourquoi ? Eh bien parce que c'est une erreur d'inaction.

En rétrospective, nous avons horreur des erreurs faites à cause de l'inaction.

 


Conclusion sur la peur de l'échec

Je répète les points importants, puis je vous donne ma conclusion :

(1) Nous pensons que l'échec va nous terrasser. Nous sommes donc englués dans l'inaction. Nous pensons que la pire erreur que nous pouvons commettre est, au contraire, une erreur d'action.

(2) En réalité, il n'en est rien. Notre système immunitaire psychologique est là pour nous protéger et nous fera surmonter l'évènement douloureux, avec le temps. Notre bonheur, dans l'ensemble, ne sera pas impacté.

(3) En rétrospective, lorsque nous faisons le point sur notre vie, nous avons horreur des erreurs faites à cause de l'inaction. Notre système immunitaire psychologique peine à justifier une telle erreur.

 

Pas besoin d'avoir un doctorat en psychologie pour tirer cette conclusion évidente :

Qu'attendons-nous pour agir ?

➜ Si nous agissons et nous prenons un râteau, nous rebondiront relativement facilement.

➜ Si nous ne le faisons pas, un jour, nous regretterons cette inaction.

 


Références

(1) Gilbert DT, Pinel EC, Wilson TD, Blumberg SJ, Wheatley TP. Immune neglect: a source of durability