Accro au réseaux : peur de rater quelque chose !
L'homme est un animal social. Il a besoin d'être soutenu par son groupe afin de s'épanouir. Et lorsqu'il s'éloigne du groupe, il a peur de rater quelque chose.
C'est une réaction normale qui est fortement inscrite dans notre passé génétique. Si l'on ne fait pas partie intégrante du groupe, on pourrait bien être rejeté.
Et lorsqu'un animal qui vit en meute est rejeté, c'est en général le début de la fin. Il n'est plus apte à faire face aux dangers qui se cachent dans son environnement.
L'être humain étant un animal intelligent (mouais, ça se discute, on est d'accord), il a plus d'outils, en théorie, pour vivre seul. En revanche, ce n'est pas en solitaire qu'il s'épanouira. Il recherche donc, lui aussi, la meute.
Et avec l'arrivée des réseaux sociaux, cela lui joue des tours...
Église, place du village et foyer étudiant
Au départ, il y a la tribu. Dans des temps très anciens, le noyau dur que constitue la tribu est essentiel à notre survie.
Ensuite, l'être humain s'organise en villages. Il y a partage des tâches et du travail. La tribu est maintenant beaucoup plus grosse. Pas le temps de trop socialiser, sauf lorsqu'on se croise sur la place du village, ou le dimanche lorsqu'on se retrouve à l'église.
Après la messe, on prend une heure pour échanger sur les moissons et autres nouvelles. Le cercle social existe toujours, mais c'est le début de la fin.
Puis arrive l'ère de l'industrialisation, l'explosion du cercle social, la perte de l'homme dans la jungle de béton. Dans cet exode du vert vers le gris, l'animal que nous sommes fait de son mieux pour garder son cercle social.
Associations, cercles sportifs. Rendez-vous au bistrot. Bref, chacun recrée sa tribu. La tribu s'entraide, elle évolue, et chaque membre du groupe a très envie d'obtenir les dernières nouvelles. Il y a toujours clairement la peur de rater quelque chose si on n'est pas en contact.
Je pense aussi à mes années étudiantes lorsque je dormais dans un foyer pas loin du lycée. Le soir, on mangeait vite pour se retrouver au foyer. C'était, là encore, l'endroit où la tribu tissait des liens et s'entraidait (et disait beaucoup d’âneries, et planifiait le prochain mauvais coup, accessoirement 🙂 ).
Arrive la télé !
Le gamin des années 1970 que je suis a bouffé une quantité phénoménale de télé.
La télé, c'était la fenêtre sur l'univers. C'était l'occupation de ceux qui n'avaient pas envie de lire (enfin oui et non, on faisait les deux). C'était le divertissement qui nécessitait un QI de 12 et demi.
La télé nous permettait d'observer les autres depuis le confort de notre sofa. On était tous derrière cette petite fenêtre, la bouche à moitié ouverte, le regard perdu, à se faire nourrir à la petite cuillère d'informations sans importance.
Et quel bonheur ! Car il y avait aussi les moments en famille, la Dernière Séance tous les mardis avec mon père... on regardait les westerns... même celui de 23h 🙂
Et même si la télé calmait un peu notre peur de rater quelque chose, on se retrouvait toujours avec les copains sur nos vélos. Ça, c'était pas une option, d'autant plus qu'au bout d'un moment, on se faisait catapulter dehors par nos vieux.
Va un peu prendre l'air !
Arrivent les réseaux sociaux
Prenez la télé, rajoutez-y un mode de communication écrite en temps réel, multipliez le nombre de chaînes par un facteur à faire tourner la tête, et vous avez, en gros, le réseau social.
Et c'est en fait ce mode d'échange par écrit qui a tout foutu en l'air. En effet, avec la télé, on ne pouvait clairement pas communiquer avec les copains et les copines. Ni avec tata Odette. Il fallait donc, au bout d'un moment, prendre le téléphone, ou le vélo, et aller côtoyer de l'humain.
Mais terminé tout ça. Le mode d'échange par écrit nous donne l'impression qu'on est en contact. Qu'on communique. Qu'on a des potes. Plein, plein de potes.
"J'ai 850 amis sur Facebook, et toi ?"
On appartient a des groupes. Plein de groupes. Tellement de groupes qu'on n'arrive plus à savoir qui fait quoi et où.
Tout ceci a créé une situation anxiogène jamais égalée auparavant. La peur de rater quelque chose s'est transformée et obsession de la connexion continue. Si je ne vérifie pas mon fil d'actualité toutes les heures, je ne vais pas pouvoir tout savoir sur tout. Pauvre petit moi.
Soigner la peur de rater quelque chose
Prêt pour une liste de solutions plus ou moins drastiques ? Je vous préviens, ça risque de ne pas vous plaire. Mais j'ai moi-même appliqué ces règles, et quel soulagement.
Le mieux serait de quitter les réseaux sociaux d'un point de vue personnel. Vos amis, les vrais, sauront comment garder contact avec vous. C'est ce que j'ai fait. Faites un dernier post, expliquez vos raisons, donnez vos informations pour rester en contact.
Depuis, je n'y suis que d'un point de vue professionnel comme expliqué ici (quoi que je dois aussi parler de moi un minimum).
J'ai toujours un profil FB, il m'en faut un pour avoir une page professionnelle. Mais je ne l'ai plus consulté depuis 2015. Je ne réponds plus aux messages privés. Ceux qui veulent me contacter font l'effort d'utiliser des moyens décidément très vieille école 🙂
Je prends toujours la température régulièrement pendant la semaine en me connectant et en regardant ce que les gens postent et échangent. Mais ceci fait partie de mon travail. Et ce n'est pas anxiogène du tout.
Une approche plus graduelle...
Voici des suggestions si vous ne voulez pas complètement laisser tomber. Je comprends tout à fait si vous avez besoin d'une période de sevrage.
● Ignorez les réactions sur les informations que vous postez. Si vous postez des photos, infos ou autre, c'est que vous avez envie de les partager. Peu importe si vous obtenez 5 likes ou 50. Car si vous obsédez là-dessus, vous irez vérifier toutes les 15 minutes.
● Ignorez les messages sur vos posts. Dites à vos amis de vous contacter par MP s'ils ont besoin de vous. Oui ça fait mauvais effet, du style celle ou celui qui n'en a plus rien à faire. Mais là encore, vos vrais amis comprendront (car vous aurez aussi fait un post à ce sujet).
● Ne consultez votre fil d'actualité qu'une fois par jour. C'est votre récompense, votre petit sucre d'orge quand vous faites votre pause. Mais attention, les sucres d'orges, on n'en abuse pas sinon on s'abîme les dents.
Mettez un timer si nécessaire pour ne passer que 5 minutes et pas plus. Cela suffira largement. Au-delà, c'est comme manger une 5e tranche de pizza, on le fait sans réfléchir mais ça nous fait du mal :-).
Aspect professionnel
Si, comme moi, vous utilisez Facebook ou Instagram pour vos activités professionnelles, attention au piège ! La peur de rater quelque chose va, là encore, s’immiscer dans votre temps d'écran.
En effet, impossible de faire la distinction entre le professionnel et le personnel. Je regarde mon fil d'actualité, et je vois beaucoup de posts reliés à mon sujet de prédilection (les plantes médicinales et la santé au naturel).
En revanche, il y a aussi les posts de mes amis qui s'entremêlent ! Et là, si je ne fais pas attention, ma connexion rapide journalière se transforme en séance de cinéma. Le fil d'actualité se transforme en une grosse pelote de laine.
Donc là encore :
● Faites votre post et s'il vous plaît, ignorez les réactions !
Vous avez fait le post car vous désirez parler de vous et vous faire connaître. Ça plaira à certains et pas à d'autres comme j'explique ici. Il est normal de vérifier ses statistiques de temps en temps (ex : une fois par semaine).
Mais le nombre de réactions immédiates, on s'en cogne un peu.
● En revanche, il faudra répondre aux questions. Mais ceci, vous pouvez le faire une fois par jour. La personne attendra. Et elle verra, au fil du temps, que vous êtes peut-être un peu lent à répondre, mais vous répondez.
De plus, vous constaterez deux choses :
(1) certaines questions, comment dire, mieux vaut les laisser passer. Elles s'éteignent par elles-mêmes tellement elles sont irréfléchies.
(2) d'autres personnes répondront pour vous. Ce qui parfois mettra un petit coup à votre ego (du style "ah zut, elle a montré son savoir et pas moi".
Mais ne vous sentez pas obligé de surenchérir ou de rajouter un commentaire qui signifie "moi aussi je sais". Pensez au long terme. Au final, tout ceci ne fera pas de différence si vous posez un contenu de qualité.
● Ne vous laissez pas entraîner par les posts personnels de vos amis. Vous êtes là pour le taf, donc faites le taf. Et donnez-vous éventuellement 5 minutes à un autre moment, pour vérifier la partie perso.
Entre peur de rater quelque chose et curiosité malsaine
Posez-vous aussi la question suivante : vous avez peur de rater quoi, au juste ?
Au fil de ces derniers mois, quels sont les évènements majeurs que vous auriez manqués si vous n'aviez pas vérifié votre fil d'actualité 5 fois par jour ?
En réalité, nous sommes très souvent propulsés par une curiosité malsaine. Nous sommes là, tranquillement derrière le smartphone, à boire un petit café. Et une foule de gens déballent leurs joies, leurs peines, leurs frustrations.
C'est comme si on regardait la vie des voisins bien cachés derrière la palissade. Et on se dit qu'on s'intéresse, que c'est pour garder contact.
Mais on ne se ment un petit peu, non ? Est-ce qu'il n'y a pas une bonne dose de ragots, de curiosité malsaine ?
Je le pense sincèrement. C'est pour cela que j'ai décidé de faire une diète low-FB et low-Insta (c'est mieux que le low-carb et le low-fat).
Ce régime avait une date de démarrage et il n'aura pas de date de fin. Ça vous dit de perdre quelques kilos d'informations superflues ?