Déprime du covid : intégrer la sagesse de Viktor Frankl

La déprime du covid semble toucher de plus en plus de personnes. Ces derniers temps, j'ai reçu de nombreuses questions qui ressemblent, si je lis entre les lignes, à un appel de détresse. Cette tendance m'inquiète.

Je ne suis ni psychiatre ni psychologue. Je n'ai pas forcément de solutions à ce problème. Mais j'ai beaucoup défriché ce domaine fascinant de la quête du bonheur, et j'ai des choses à partager.

Parfois, il suffit d'un changement de perspective, d'une nouvelle manière de voir pour qu'une période difficile devienne un peu plus douce.

La vie semble bien obscure lorsqu'on se sent emprisonné tout en bas, dans les tranchées, et que l'on n'a plus de visibilité. Il faut alors prendre un peu d'élévation, regarder au-dessus des nuages. C'est le but de cet article.

Déprime du covid : nouveaux projets(du vieux tronc naîtront les jeunes pousses...)

Frankl et le sens de la vie

Je vous ai déjà parlé brièvement de Viktor Frankl, de cette incroyable force qui lui a permis de survivre les camps de concentration. Il s'était fixé un cap, s'était donné un objectif lorsqu'il sortirait des camps.

Bien sûr, la probabilité était qu'il ne sortirait jamais des camps, qu'il serait exterminé, comme sa famille et ses proches l'avaient été. Mais cette idée ne l'a jamais abattu.

"Lorsque nous ne pouvons plus changer la situation, nous devons nous changer nous-même".

Cette phrase de Frankl est très puissante et il est bon de rester dessus quelques minutes. Je vous invite à le faire.

Ces dernières décennies, les sociétés industrialisées ont eu cette impression de tout contrôler. Le marché du travail, de la bourse, de l'immobilier. Les plus chanceux d'entre nous ont eu une éducation gratuite, un toit, une maison, une voiture, de la nourriture à ne plus savoir qu'en faire, des gadgets plein les tiroirs.

Et puis février 2020 arrive, et le château de cartes se casse la figure. Plus rien n'est prévisible. Le pare-brise est embrumé, plus aucune visibilité sur la route. Notre moral est en berne car nous avons rompu les liens avec de nombreux collègues et amis. Notre avenir financier est en question car qui sait si nous aurons du travail dans 6 mois ?

 

Le changement, opportunité de croissance

L'environnement artificiel des sociétés modernes nous a fait oublier un point crucial : dans la vie, tout est changement. Tout se fait et se défait continuellement. Et nous pensons faire exception à cette règle ?

Sans changement, la vie n'est pas possible. La chrysalide ne peut devenir papillon qu'au travers d'un incroyable processus de transformation. Ce processus inclut parfois traumatisme et souffrance.

Les recherches et l'expérience démontrent que traumatismes et souffrances peuvent devenir un incroyable vecteur de croissance. Ceci ne minimise absolument pas la douleur physique ou émotionnelle subie pendant les épisodes difficiles.

Mais de ces épisodes peuvent naître la croissance et la maturation. Voici ce que les études nous disent au sujet des bénéfices de tels épisodes, avec 5 catégories clés (*) qui sont systématiquement citées par ceux qui ont traversé des moments très durs :

  • Une plus grande appréciation de la vie et de ce qui compte vraiment
  • Des relations plus proches et plus intimes avec les autres
  • Une capacité à apprécier nos atouts et nos forces
  • La possibilité d'envisager de nouvelles possibilités, de nouvelles initiatives, de nouveaux projets
  • Le développement spirituel

Les bénéfices arrivent, bien sûr, a posteriori. A priori, lorsque nous traversons l'épisode difficile, rien n'a de sens. C'est le découragement, l'envie de baisser les bras, à quoi bon...

Mais a posteriori, très souvent, tout a du sens au contraire. On se dit "maintenant, je comprends".

Et très souvent, on ne changerait rien à ce qu'il s'est passé. Là encore, ceci ne fait pas disparaître la perte, la douleur, le deuil. Mais de cette souffrance éclora le changement.

Déprime du covid : changer de perspective

Revenons à la citation de Frankl : "Lorsque nous ne pouvons plus changer la situation, nous devons nous changer nous-même".

Nous ne pouvons rien changer à la situation actuelle. Nous n'avons même pas de consensus sur les bonnes mesures à adopter pour revenir à la normale. C'est le flou total. Personne n'a de réponses.

Si nous essayons de changer ce qui est à l'extérieur de nous, cela nous mène effectivement vers la déprime du covid.

Il faut donc changer ce qu'il se passe à l'intérieur de nous. Notre manière de voir et de traverser cette période. N'est-ce pas une opportunité pour réapprendre à vivre dans la "constance du changement", comme bien des peuples l'ont fait avant nous ?

N'y aura-t-il pas, une fois cette crise terminée, un sens nouveau à la vie, de nouvelles priorités ? Je le pense sincèrement car je vois déjà que dans mon petit cercle, nous avons une nouvelle manière d'apprécier de simples rencontres, un moment d'échange, une marche en nature.

Certains disent "oui mais ça ne durera pas, la société de consommation reprendra vite le dessus". Pas pour tous. Nous ne sommes pas obligés de suivre cette tendance. Nous pouvons décider de voir les choses autrement.

Face à la déprime du covid : les nouveaux projets

Frankl a démontré la puissance de se donner des objectifs une fois que la crise sera passée. Il s'était dit qu'une fois sorti des camps de concentration, il aiderait les personnes à trouver un sens à leur vie.

Si Frankl a pu donner un sens à la souffrance incroyable de perdre sa femme enceinte, sa famille, de se faire torturer physiquement et mentalement, je pense que nous pouvons, nous aussi, trouver un sens à la crise du covid.

Pour ce faire, il est important de réfléchir aux projets que nous allons faire une fois la crise terminée.

Il n'y aura peut-être plus jamais de retour à la normale, qui le sait. Mais il y aura le retour des rencontres, échanges, initiatives citoyennes, changements de carrière, associations caritatives et autres projets qui ont vraiment du sens.

Que ferez-vous une fois sorti de cette crise ? Quels seront vos nouveaux projets ?

Si vous ressentez actuellement la déprime du covid comme tant de personnes, cette simple réflexion est primordiale. Projetez-vous. Commencez à planifier dès maintenant.

Envisagez un futur rempli de défis que vous êtes prêt à aborder. Fermez les yeux, visualisez-le clairement dans votre tête. Où serez-vous dans 2 ans ? Que ferez-vous ? Projetez ce film avec des couleurs, des sons, des odeurs.

Je termine avec cette citation de Frankl :

"On peut tout prendre à une personne sauf une chose : la dernière des libertés humaines - de choisir son attitude face à n'importe quelle circonstance, de choisir son propre chemin"

Allons-nous choisir le chemin de la névrose, ou le chemin d'une nouvelle vie prête à éclore, d'une petite graine en dormance qui n'attend que le retour du printemps pour germer ?

(*) Tedeschi, Richard & Calhoun, Lawrence. (2004). Tedeschi RG, Calhoun LG Posttraumatic growth: conceptual foundations and empirical evidence. Psychol Inq 15(1): 1-18. Psychological Inquiry - PSYCHOL INQ. 15. 1-18. 10.1207/s15327965pli1501_01.