Relations familiales compliquées

Cette citation de Ram Dass est un cadeau. En effet, elle nous aide à mieux nous comprendre et surtout, à ne pas trop nous prendre trop au sérieux.

Vous pensez être éveillé ? Allez passer une semaine en famille.

Baba Ram Dass (Richard Alpert)

On parle ici de relations familiales compliquées.

En ce qui me concerne, la famille au sens large est le test ultime de mes progrès.

J’aime ma famille. Ceci n’est pas un jugement sur qui ils sont. Ils sont qui ils sont et je n’ai rien à dire à ce sujet. C’est l’intersection entre qui je suis aujourd’hui (mes vues et ma philosophie de vie) et qui ils sont, qui crée parfois des étincelles.

Dans le texte qui suit, je fais apparaitre mes relations familiales d’une manière caricaturale. À la provençale, tout sera exagéré. Ceci m’aide à exposer mes vues.

Ceci dit, décortiquons ce terrain de jeu idéal pour notre pratique de la patience et la bienveillance.

Relations familiales compliquées : image de la vague


On ne choisit pas sa famille

Dixit Maxime le Forestier* et confirmé par vous et moi.

Quelle est la probabilité que, dans la vraie vie, vous soyez devenu bon ami avec la tata Nicole ou le cousin Cédric ? Quasi nulle, on est d’accord.

La famille fournira donc le melting-pot idéal pour notre pratique, nous emmenant dans toutes nos zones d’ombre, nous piquant juste à l’endroit où ça fait bien mal.

On peste souvent contre la famille. Mais à l’inverse, il faudrait les remercier de nous fournir un tel terrain de jeu.


Différentes postures envisageables

Posture 1 : le maître d’école

Dans mes jeunes années (ok, un peu plus tard même), je me laissais immédiatement entraîner dans les arguments familiaux en perdant mon regard externe. Je devenais l’argument.

Je savais mieux qu’eux, bien évidemment. Il fallait que je "fasse" leur éducation. Il fallait convaincre l’autre absolument, par A + B. Chaque côté de la table aura ses chiffres, ses arguments bétons.

On vit dans deux réalités parallèles ou quoi ?

Et ça nous conduit où ? Souvent au feu d’artifice. Arriver à convaincre quelqu’un déjà convaincu (d’une position différente de la nôtre) est, vous l’aurez remarqué, mission impossible. Sauf si la personne est déjà d’une grande ouverture. Ce genre de bestiole est rare en nature.

Je place cette attitude au plus bas de l’échelle. On commence tous par là.

➜ Posture 2 : zen dehors, cocotte-minute dedans

Ensuite, j’ai réussi à ne plus me laisser entraîner dans certains arguments « cause perdue ». En effet, allons-nous convaincre le tonton Fred que le réchauffement climatique est inquiétant et que l’écologie n’est pas juste un frein à son pouvoir d’achat ? Vous sentez le sang qui vous monte à la tête ?

C’est dans ce genre de situations que j’ai appris à développer ma position d’observateur.

L’observateur observe avec beaucoup de curiosité, mais ne devient pas l’objet de son observation. Il garde une certaine hauteur, et même (lorsque les astres sont alignés) une certaine neutralité et un non-jugement des intervenants.

C’est duuuuur ! Mais tellement mieux qu’un argument qui se termine mal.

Si je reste en famille pendant plusieurs jours d’affilée, je note une accumulation de frustration. Ceci n’est pas bon, of course. L’observateur qui regarde un petit écosystème à la loupe n’est pas frustré par ce qu’il s’y passe, même si la fourmi décide de manger le moucheron.

Je monte donc en pression, lentement mais sûrement.

Je remarque aussi que parfois, je m’interdis d’intervenir pour exprimer un certain point de vue. Car je l’ai fait dans le passé, et je vois bien où cela m’a emmené (indice : le mur, avec bonus, en bruit de fond, quelques hurlements). Enfin, vous voyez quoi, la discussion passionnée du provençal qui monte le son et agite ses bras comme un moulin à vent.

L’apparence calme que je donne en extérieur n’est donc, hélas, qu’une apparence. Mais c’est déjà un progrès vers un meilleur séjour en famille.

Posture 3 : observateur et intervenant ancré

Un jour, quand je serai grand…

J’aimerais pouvoir observer sans juger. J’aimerais pouvoir intervenir, exposer mon point de vue dans une position ancrée dans le moment présent.

J’aimerais participer et échanger sans me soucier de mon besoin égotique de ressortir la main haute, avec l’impression d’avoir « gagné » l’argument. Il n’y a rien à gagner ici, souvent tout à perdre. Mais parfois, j’ai envie de partager un point de vue.

Lorsque j’arrive à le faire, je le fais au travers de questions qui ne sont pas orientées.

En fait, j’ai noté qu’on est souvent plus ou moins d’accord sur certains problèmes, mais on ne l’est pas du tout sur la cause ainsi que les solutions.

Une question orientée inclut des éléments de cause ou de solution dans la question. Ce genre de questions est donc problématique, elle fera fortement réagir les intervenants.

Les questions les plus intéressantes sont les plus ouvertes. Trouver ces questions, c’est tout un art… Mais j’ai remarqué que parfois, elles créent un terrain d’entente et nous rapprochent.

Un jour, quand je serai grand, je ressortirai d’une semaine en famille sans les poids du « si j’avais su, j’aurais dit … »


Remercier ceux qui nous font pratiquer

La position Bouddhiste me convient.

Remercier ceux qui nous font pratiquer.

On pourrait couper les ponts. Mais c’est un peu triste aussi. Ces personnes sont humaines, comme nous. Elles ont leurs souffrances, comme nous.

S’il ne reste que ceux qui sont d’accord avec nos positions, qu’avons-nous à apprendre des relations humaines ? Et l'influence que les autres ont sur nous ?

Célébrons les relations familiales compliquées.

Un jour, quand je serai grand, je serai en capacité de remercier, avec tout mon cœur, celles et ceux qui me font sortir de mes gonds 🙂


(*) Maxime le Forestier - "Être né quelque part" - https://www.youtube.com/watch?v=DagKAzSk9Z8