Quand la colère prend le dessus

Quand la colère prend le dessus, nous nous plaçons dans un état physiologique qui, au le long terme, est propice au développement des maladies.

Vraiment, j'ai beau tourner et retourner le sujet dans ma tête. J'ai beau aller fouiner dans les études scientifiques. Ou piocher dans mon passé. Je n'arrive à trouver aucun avantage à l'état de colère chronique.

Si je vous en parle, c'est que j'ai vécu sous sa domination. Elle, grande tortionnaire des esprits, dictatrice des émotions.

Et si je me suis calmé au fil des années, c'est que j'ai bien compris la chose suivante : soit je décidais de changer, soit cet état allait me ronger de l'intérieur. Oh, cela n'a rien de facile. Mais c'est une question de survie.

L'une des raisons principales qui m'ont motivé à changer est le bien-être de mes proches. Et tout de suite après sur la liste : mon propre bien-être et la prévention des maladies.

Voici un petit tour d'horizon de ce que la colère remue à l'intérieur de vous d'un point de vue physiologique, au cas où vous ayez besoin de motivation 🙂

Quand la colère prend le dessus...

 


Quand le cœur s'emballe

La colère est un facteur aggravant (provocateur ?) des accidents cardiovasculaires (1).

Le docteur Murray Mittleman, à la faculté de médecine d'Harvard, explique : "La colère provoque une effusion d'hormones de stress comme l'adrénaline, ce qui fait battre votre cœur plus vite et augmente votre tension artérielle. Votre sang est plus propice à former des caillots, ce qui est dangereux en particulier si vos artères sont partiellement bouchées par la plaque artérielle".

De plus, si vous avez déjà souffert d'un problème cardiaque, la colère est un facteur de risque qui peut rendre le problème récurrent (2). Et on est d'accord, une crise cardiaque, ça suffit largement, une deuxième n'est pas nécessaire pour faire passer le message.

La colère manipule aussi vos globules blancs qui auront plus tendance à s'agglutiner sur la paroi de vos artères et favoriser la plaque artérielle (3).

Vous tenez à votre cœur ? Alors il n'y a pas à tortiller, il faut travailler sur votre colère. En particulier si vous avez des antécédents familiaux ou des facteurs de risques (surpoids, hypertension, etc).

(Le message commence même à apparaître dans les magazines à grande circulation, bien que je ne sois pas d'accord avec tous les points de cet article fait pour "la grande consommation").

 


Esprit enflammé, corps enflammé

On parle de plus en plus de l'inflammation "de bas bruit" comme cause potentielle de nombreuses maladies. En effet, certains d'entre nous sont dans des états d'inflammation constante, mais le niveau de l'inflammation est si bas qu'on ne le repère pas. Pas de symptômes, pas de douleurs, pas de "bruit".

Mais au fil des mois, des années, cette inflammation chronique fait de nombreux dégâts dans les organes et les tissus et peut contribuer à l'arriver de nouvelles maladies.

Les études montrent, par exemple, que la colère dans une relation de couple provoque une augmentation des interleukines 6 (un médiateur inflammatoire) et de la protéine C-réactive (4). Pour information, un niveau élevé de protéine C réactive est aujourd'hui considéré comme un facteur de risque pour de nombreuses maladies dégénératives.

De plus, il suffit de se souvenir de l'épisode qui nous a mis en colère pour provoquer à nouveau un état inflammatoire ! (5)  La rumination n'est donc pas productive (et elle est très compliquée à dompter, nous sommes d'accord).

 


Quand la colère prend le dessus, la guérison fout le camp

La colère inhibe vos fonctions de réparation et de guérison.

Exemple. Prenez 98 personnes et provoquez des lésions de type ampoules sur leur bras. Ensuite, observez ces personnes pendant 8 jours pour mesurer la vitesse de réparation de ces lésions.

Résultat : les individus qui ont le plus de mal à contrôler leur colère guérissent moins vite.

D'autres études démontrent les effets néfastes de la colère sur l'immunité. Par exemple, dans une autre étude (6), on voit que la colère diminue la production d'immunoglobulines salivaires. Ces immunoglobulines constituent la première ligne de défense contre les pathogènes au niveau de la bouche.

Et si cette inhibition se déroule au niveau de la bouche, il est fort probable qu'elle se déroule aussi ailleurs dans le corps, diminuant donc l'efficacité de nos défenses naturelles.

Si vous voulez être en capacité de repousser les infections et les cellules cancéreuses, il faudra donc apprivoiser votre colère.

Bref, vous m'avez compris, le colérique y perd sur tous les fronts. Non seulement il tourmente ses proches, mais il malmène aussi son corps et ses fonctions physiologiques. Pour "se soigner", il y a des choses à faire, et des choses à ne pas faire...

 

 

(1) Rozanski A, Blumenthal JA, Davidson KW, Saab PG, Kubzansky L. The epidemiology, pathophysiology, and management of psychosocial risk factors in cardiac practice: the emerging field of behavioral cardiology. J Am Coll Cardiol. 2005;45:637–651.

(2) Park JH, Bae SH. [A systematic review of psychological distress as a risk factor for recurrent cardiac events in patients with coronary artery disease]. J  Korean Acad Nurs. 2011 Oct;41(5):704-14. doi: 10.4040/jkan.2011.41.5.704.

(3) Greeson JM, Lewis JG, Achanzar K, Zimmerman E, Young KH, Suarez EC. Stress-induced changes in the expression of monocytic beta2-integrins: the impact of arousal of negative affect and adrenergic responses to the Anger Recall Interview. Brain Behav Immun. 2009;23(2):251–256.

(4) Kiecolt-Glaser JK, Gouin JP, Hantsoo L. Close relationships, inflammation, and health. Neurosci Biobehav Rev. 2010;35:33–8.

(5) Suarez EC, Saab PG, Llabre MM, Kuhn CM, Zimmerman E. Ethnicity, gender, and age effects on adrenoceptors and physiological responses to emotional stress. Psychophysiology. 2004;41:450–60.

(6) Rein, Glen & Atkinson, M. & McCraty, Rollin. (1995). The physiological and psychological effects of compassion and anger. Journal of Advancement in Medicine. 8. 87-105.